Comme pour justifier le secret de la condamnation de Mohamed Harkat, le juge Noël a depuis publié plusieurs notes de bas de page « top secrètes », nouvelles et caviardées sur ce jugement qui, selon les avocats du gouvernement, mettraient en péril la sécurité nationale si elles étaient publiées. Leur disponibilité récente n'a pas fait tomber le ciel sur nos têtes, mais quiconque est intéressé à les lire découvrira que la chose la plus dangereuse à leur propos est la quantité d'encre utilisée pour imprimer page après page de larges blocs noirs pour garder secret ce qui se trouve en dessous, ponctués seulement de temps en temps par un mot ou deux. La page 7, par exemple, est incroyablement utile. Sous le chapitre « Armes », pas un seul mot, seulement beaucoup d'encre noire. Sous la section « Afghanistan », on ne peut lire que : « Harkat nie être allé en Afghanistan », suivi d'un tiers de page d'encre noire. La section « Ressources financières » est un autre grand bloc d'encre noire suivi de la phrase éclairante du juge Noël qui se lit : « Sur la base de ces informations, la Cour conclut que Harkat avait d'autres ressources financières à sa disposition au Pakistan ». Les pages 13 et 14 sont entièrement caviardées.Et les choses ne font qu'empirer dans un document distinct, version expurgée d'une annexe anciennement « top secret » de ce jugement. Aucun devoir de franchise et de bonne foi
Ce qui est révélé dans cette annexe est vraiment troublant, car est discutée une motion présentée par les avocats spéciaux (des avocats qui ont la plus haute cote de sécurité) qui ont fait valoir que les ministres du gouvernement qui ont déposé le certificat de sécurité « avaient manqué à leur devoir de franchise et bonne foi absolue, car ils n'ont pas fait leurs meilleurs efforts pour recueillir l'information pour la Cour afin que celle-ci puisse arriver à une décision éclairée ». (Pour ceux qui ne connaissent pas le terme, « franchise » signifie « la qualité d'être ouvert et honnête ; franchise, l'équité ; impartialité ») Que les avocats spéciaux aient déposé une telle motion n'a rien de surprenant. Le SCRS, l'agence d'espionnage derrière les certificats, a une longue histoire de ne pas fournir toutes les informations dans son dossier dans les chambres secrètes où les audiences secrètes se tiennent. Cela comprend retenir des informations qui seraient favorables à la personne visée, comme ne pas dire aux juges que leurs informateurs ont échoué leur test au détecteur de mensonges et utiliser des informations obtenues sous la torture. En effet, dans un jugement précédent en 2010 dans l'affaire Harkat, le juge Noël a écrit que de tels comportements et « l'incapacité du SCRS, et de ses témoins, d'agir en conformité avec l'obligation de bonne foi absolue ont porté atteinte à l'intégrité de la procédure de cette Cour .... La preuve d'une omission de divulguer des preuves pertinentes qui peuvent affecter négativement la décision de la Cour quant à la fiabilité d'une source humaine a été faite devant la Cour.... de l'information déposée par les ministres pour soutenir le certificat a été ‘filtrée' et que les promesses faites à la Cour n'ont pas été remplies. » Pendant que sont en jeu la vie et la liberté d'une personne, le gouvernement a essayé d'en passer une petite vite et il s'est fait prendre. Le plus remarquable est que le juge Noël lui a permis de s'essayer encore et que la deuxième fois il l'a cru, même s'il n'avait aucun moyen de savoir si le SCRS et les ministres disaient vraiment la vérité cette fois-là. Pourtant, comme nous l'avons appris dans un jugement de la Cour fédérale de décembre dernier dans une autre affaire de certificat de sécurité, le SCRS, qui avait reçu l'ordre de cesser d'écouter les communications entre l'avocat et son client dans cette affaire, a continué de le faire pendant deux ans au mépris manifeste de l'ordre de la cour. Par quelle magie le juge Noël a-t-il pu en arriver à la conclusion que le SCRS et ses laquais n'étaient pas en train de lui en passer une autre et ne continuaient pas d'agir de manière illégale et malhonnête ? Il y a quelques années, la Cour suprême du Canada a statué que le devoir de franchise et de bonne foi absolue était particulièrement important lors des audiences secrètes (notez le contresens), parce que la personne qui n'était pas dans la salle ne pouvait pas se défendre elle-même. Mais selon l'annexe rendue publique dans l'affaire Harkat, en réponse à la motion de l'avocat spécial disant que cette bonne foi faisait manifestement défaut, « les ministres ont répondu que le devoir bonne foi absolue ne s'applique pas à la procédure des certificats de sécurité ». Un aller simple vers la torture Noël dit que tout cela importe peu puisque, à son avis, les ministres lui ont fourni suffisamment d'information pour condamner Mohamed Harkat in absentia. Par conséquent, il écrit qu'il ne souhaite pas « se prononcer quant à la portée du devoir de bonne foi » lors des audiences secrètes, une déclaration qui laisse supposer qu'il y a une marge de manoeuvre pour justifier, par exemple, 50 %, voire 30 % de bonne foi au lieu des 100 % à laquelle on est en droit de s'attendre. Son approche particulièrement sévère envers Mohamed Harkat, surtout après les malversations du gouvernement, en dit long, encore une fois, sur l'injustice inhérente et le danger des audiences secrètes : le manque de transparence fait qu'il nous est impossible de savoir exactement ce qui s'est passé et, en conséquence, Mohamed Harkat se voit remettre un billet aller simple vers la torture à moins que les gens à travers le continent n'interviennent et ne manifestent leur opposition. Cette intervention, pour commencer, serait d'ajouter votre nom à la liste de ceux qui condamnent les procès secrets au Canada à : www.harkatstatement.com où vous pouvez signer la déclaration en ligne contre les procès secrets au Canada. Campagne pour arrêter les procès secrets au Canada, PO Box 2020, 57 rue Foster, Perth, ON K7H 1R0 Note 1. Homesnotbombs.blogspot.com/2010/12/harkat-condemed-by-secret-allegations.html
(Traduction : LML)